Nov 6, 2024

Les besoins de flexibilité selon RTE


Le mois d'avril 2024 marque un passage de flambeau dans l'industrie photovoltaïque Européenne. Alors que le titre de plus grande centrale PV d'Europe était jusque là détenue par le site Espagnol de Nunez (500MWc), c'est désormais l'Allemagne qui détient le record avec 605MWc installés près de Leipzig sur une ancienne mine de lignite.


En dehors de la dimension anecdotique d’un record facilement battu par la centrale solaire de Midong en Chine (3,5GW pour 80 000 hectares), ce nouveau record témoigne de la croissance exponentielle du solaire en Europe. Le graphique suivant, fourni par RTE, illustre cet essor.


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Alors que les crises des subprimes puis des dettes souveraines avaient fait chuter les installations (le délai de quelques années étant dû aux délais de permis et de construction), la tendance semble bel et bien repartir à la hausse.


Cette augmentation des installations présente deux avantages majeurs. Tout d’abord, la réduction des émissions de l’UE, avec des panneaux bien moins émetteurs que le charbon Allemand ou que la lignite Polonaise. Ensuite, une réduction des coûts, avec une énergie produite à coût marginal quasi nul permettant de baisser la facture des ménages et des entreprises. Un inconvénient majeur subsiste néanmoins : le problème de l’adéquation entre l’offre et la demande énergétique.


Le solaire, une nouvelle solution apportant de nouvelles questions

Le problème ici posé par le solaire est simple : en été, lorsque le soleil se lève, des centaines de centrales commencent à produire et lorsque la nuit tombe, celles-ci s’éteignent. Ce profil de production localisée sur certains horaires seulement est principalement propre au solaire ; sur le graphique ci-après, aussi fourni par RTE, on observe bien le différentiel de production à compenser entre jour et nuit et l’incapacité de l’éolien à compenser cette périodicité solaire :

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La multiplication des installations PV conduit ainsi à une abondance d’énergie dans la journée qui redéfinit les heures pleines et creuses. RTE préconise ainsi de redéfinir ce concept en fonction de la demande résiduelle (en rouge sur le schéma) :

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On observe sur ces graphiques que, à la faveur de l’installation du PV, la nouvelle heure creuse, où la consommation est encouragée pour éviter la saturation du réseau, risque bien d’être en journée et non plus au cours de la nuit.

Une seconde question émerge alors : celle de la double périodicité du solaire. En effet, les panneaux produisent en suivant une périodicité quotidienne, mais également selon une périodicité annuelle ; l’énergie produite par le photovoltaïque est ainsi bien supérieure en été qu’en hiver. Le graphique ci-après illustre la différence entre des étés où la demande résiduelle sera nulle en milieu de journée et des hivers où la demande énergétique, bien plus importante, nécessitera le recours à d’autres sources d’énergie.

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En somme, la croissance exponentielle du solaire permet de diminuer la dépendance aux énergies fossiles mais demande une capacité d’adaptation accrue. La question posée par RTE est alors celle-ci : comment, sans utiliser de centrale à charbon ou à gaz, peut-on amener de la flexibilité sur le réseau pour en éviter la saturation ?


Une recherche de flexibilité tout azimuts … qui rappelle des souvenirs

Une première piste pointée du doigt par RTE est la flexibilité de la demande avec, par exemple, le concept d’heures creuses. En pointant comme telles les heures de production du solaire, on parviendrait à encourager toute sorte de consommations déplaçables : ballon d’eau chaude, lave-linge, lave-vaisselle, recharge de voiture électrique, … Une seconde piste, explorée par certains fournisseurs d’énergie était de faire payer au consommateur le prix SPOT horaire. Ce faisant, les consommateurs étaient encouragés à adapter leur consommation à la production renouvelable. L’idée n’est ici plus de changer les courbes de production mais de forcer la courbe de consommation à s’adapter à sa consœur. En structurant ainsi la consommation quand l’électricité bas carbone est bon marché, il serait ainsi possible de baisser la facture des consommateurs tout en soulageant le réseau en heure de pointe.


Il convient de noter que ces solutions ne sont pas nouvelles. Le ballon d’eau chaude, rechargé chaque nuit pour utiliser l’énergie des centrales nucléaires, montre que l’adaptation à marche forcée de la consommation sur la production n’est pas l’apanage du solaire. Un autre exemple de cette habitude était le contrat EJP (Evitement Jour de Pointe), qui proposait une réduction des tarifs aux clients disposés à ne pas consommer sur les jours où la demande allait être supérieure à l’offre. Le changement des habitudes de consommation pour suivre la production n’est donc pas une nouveauté appelée par le solaire.


Un second axe de réflexion serait l’augmentation des moyens de flexibilité : batteries de stockage, véhicle2grid, STEP, production pilotable thermique décarboné, power2gas2power, power2heat, … Cependant, le potentiel de développement apparait pour l’instant limité. Le STEP est déjà déployé partout où cela est possible ; RTE explique que le vehicle2grid ne fera sens qu’à partir d’un parc de plusieurs millions de véhicules électriques ; les moyens pilotables décarbonés comme la biomasse présentent moins de potentiel de croissance que prévu (120TWh annuel dans le meilleur des scenarios à horizon 2050 selon France Stratégie contre 260 prévus précédemment) et sont présentés par RTE comme des solutions d’appoint tout au plus. Ces solutions, décrites par RTE comme étant à “l’état prospectif”, risquent de devenir nécessaires à horizon 2050 selon Gabriel Bareux, directeur de la R&D chez RTE.



Un dernier axe de réponse serait l’augmentation générale de la consommation. Avec l’électrification et la croissance économique des pays de l’UE, la demande énergétique continue d’augmenter, spécialement dans trois domaines : le numérique, l’industrie et les transports. Le chauffage, également dans les quatre usages principaux, ne devrait que peu changer la donne. Dès lors, l’augmentation de la consommation devrait tirer les courbes de demande vers le haut et ainsi diminuer la potentielle surcharge du système électrique. Bien que l’augmentation de la demande ne soit pas une solution, elle pourrait permettre de rétablir la symétrie entre variation de production et de consommation.


Une question en suspens

Au travers de la flexibilisation de la consommation, RTE propose cette courbe ajustée.

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Il apparait cependant toujours crucial de développer de nouveaux moyens de flexibilisation afin de garantir la stabilité du système. Alors que la demande électrique continue de croître, l’éolien et le solaire nous fournissent une énergie peu chère et verte ; le prix à payer pour cette énergie est sa temporalité, qui forcera les consommateurs à adapter leurs usages.